Le jeune Ours et son père Philippe Barbe (1723 - 1792)

Certain Ours eut un fils, aussi beau que son père
Cet enfant, sans cesse flatté,
Devint, comme c'est l'ordinaire,
Ce qu'on nomme un enfant gâté.
S'il ouvrait sa petite gueule
Pour dire un mot .. Ah ! que d'esprit !
Que de bon sens ! C'eft la sagesse seule
Qui peut lui dicter ce qu'il dit.
Se mettait-il quelquefois en colère ?
Il a du cœur, des sentiments.
Médisait-il ? Il est sincère.
Était-il fier ? C'est le défaut des Grands.
Bref, dans notre poupon tout paraissait louable.
En lui tout vice était aimable.
Qu'arrive t-il à de pareils enfants ?
Ils se moquent bientôt de leurs faibles parents,
L'Ours méprisa les siens dès l'âge le plus tendre.
A peine daignait-il leur parler, les entendre.
Viens avec moi, petit mignon,
Nous irons à la chasse... Non
Pourquoi mon fils ?... Vous me rompez la tête
Toujours il élevait le ton.
Jamais il ne faisait une réponse honnête.
Tous ses discours étaient choquants.
On voulait le punir. Mais il montrait les dents.
Enfin le père, accablé de tristesse,
Dit en mourant à ses amis :
De cet enfant pervers , objet de ma tendresse
J'ai bien mérité le mépris.
C'est moi, c'est moi, qui par faiblesse
Par une excessive mollesse,
Ai gâté le cœur de mon fils.

Livre I, fable 9




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