Un desservant de Flore,
Apres les feux brillants du jour,
Sur chaque plante tour a tour
Epanchait son amphore.
Toutefois devant une fleur
D'un pas indifférent il passe ;
Mais la fleur l'arrête ; — Oh ! de grâce !
Verse-moi, dit-elle, un peu d'eau :
Voici trois jours que tu m'oublies;
Point ne verrai-je un jour nouveau
Si mes racines rafraichies
Ne me rendent quelque verdeur.
Sache jusqu’à demain prendre encor patience ;
Pour demain, reprit-on, avec pleine abondance
Je te promets onde pure et fraicheur;
L’amphore est d’ailleurs désemplie
Et ma tache du jour pour l'heure est accomplie.
A demain ! poursuit-on; pour avoir attendu,
Crois-moi, tu n’auras rien perdu.
On revint à l'aurore avec amphore pleine;
C'était trop tard : la fleur avait péri.

Mettre un bienfait, mon fils, en quarantaine.
C'est mettre tout d’abord le bienfait au décri ;
Obliger promptement, c’est donner au service
Double valeur ;
T’ajourner, trop souvent c'est perdre heure propice ;
Témoin la fleur !

Livre VIII, fable 8


Hydra, 6 septembre 1854


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