Dans un vase d'argent,
Brillaient, avec ordre établies,
Diverses fleurs dès le matin cueillies ;
Leur parfum, leur fraîcheur et l'émail éclatant
De leurs couleurs vives et variées,
Charmaient les sens et flattaient tous les yeux.
L'aurore même de ses feux,
Les avait colorées.
Dans un beau parterre, non loin,
Fleurit, superbe, un millionnaire 1 ;
D'un œil dédaigneux, l'âme altière,
Il lorgne dans un coin
Ces voisines trop séduisantes.

« Salut, notre parent, car vous en êtes un ; »
Disent-elles tout haut, dans leur ton peu décentes.
Point de réponse. A part il dit : « Quel air commun !
Quelles sont ces aventurières ?
Eli ! salut mon parent !... Elles ne sont pas fières !
Quel ton, quel luxe ! en vérité,
Fi ! tout le monde se ressemble !
Plus de distinction ! noblesse, dignité,
Fortune et gens de rien, tout se confond ensemble ;
Sous ces dehors brillants,
Ça n'a pas un pouce de terre,
Boit de l'eau, porte des brillants,
- Mais n'a qu'un éclat éphémère,
Et m'appelle parent, moi, grand propriétaire ! »

Soyons observateurs quelque peu pénétrants,
Nous pourrons d'un coup d'œil reconnaître les gens :
Chacun croit qu'il est bien, et dans ses défauts s'aime ;
Montrant, sans le savoir, des travers différents,
Chacun se peint lui-même.

Livre III, fable 11




Commentaires