Le Chat et les Souris Simon Pagès (17ème siècle)

Accablé de maux et d'années,
Un chat, que la faim dévorait,
Passait les plus tristes journées.
Tapi dans un recoin, le pauvre! il espérait
Qu'enfin le dieu des chats, propice,
Amènerait quelqu'un du peuple souriquois,
Sil fat scélérat autrefois,
Il est aujourd'hui sans malice :
Miséricorde à tout pécheur.
Trois petites souris, tout fraichement repues,
Lestes, rondelettes, dodues,
Viennent trotter auprès du vieillard qui se meurt :
En le voyant : Holà ! dit l'une d'elles,
Voila Rodilard aux abois:
Vengeons-nous, vengeons-nous des injures cruelles
Que ce perfide, tant de fois,
A fait à notre race ; arrachons ce qui blesse,
Chaque griffe d'abord (mes sœurs, ne craignez rien,
Il est maintenant en faiblesse),
Et puis les dents, nous ferons bien.
Deux sautent a l'instant vers les traitresses pattes;
La troisième vers le museau :
Alors, le moribond bourreau
Ouvre ses dents, ses griffes scélérates,
Les happe en même temps, et les croque aussitôt.
Ne méprise jamais ni les chats ni les chattes,
Petit rat; ne sois pas si sot.

Livre I, Fable 23




Commentaires