Un Chat, la terreur des Souris,
Qui pour les attraper était toujours alerte,
En avait dépeuplé presque tous les logis.
C'était assez pour lui qu'une chatière ouverte.
Une d'elles s'étant, des pates du Matou,
Où mille de ses sœurs avaient perdu la vie,
Jusqu'alors toujours garantie,
N'osait plus sortir de son trou ;
Mais aussi ne mangeait que le quart de son sou.
Un jour le scélérat d'un ton de chatemite,
Lui fit, mais de loin, ce discours ;
Ma Chère, prendrez-vous toujours,
Dès lors que je parais et l'alarme et la fuite ?
Trouvez-vous donc en moi quelque chose d'affreux ?
Mon corps est cependant presqu'au votre semblable,
Si vous en exceptez les charmes de vos yeux,
Vos attraits, votre air agréable,
Votre vivacité jointe à votre enjouement,
En un mot votre gentillesse.
Quoique fort éloigné d'inspirer la tendresse,
D'un poil, tout comme vous, n'ai-je pas l'ornement ?
Mais à tout ce beau compliment,
Damoiselle Souris faisait la sourde oreille.
Le Galant qui vit bien que c'était temps perdu,
De dire qu'elle était du monde la merveille,
Crût qu'un peu de fromage aurait plus de vertu
Etant, comme elle était, plongée en la disette de la Pauvrette,
Il en vint donc poser aux yeux
A quelque distance du trou ;
Après quoi le rusé Filou,
S'en alla se tapir près d'un fac de farine.
La Souris ne le voyant plus,
Au morceau de fromage aussitôt s'achemine
Mais lui, dans deux sauts tout au plus ;
Du trou lui coupe le refuge,
Ensuite la hape et la gruge.
Telle se peut vanter d'avair par sa raison
Rejeté d'un Galant les flatteuses paroles,
Qui, pour ne succomber à l'éclat des pistoles
A besoin de cette Leçon.