Les deux Fontaines Simon Pagès (17ème siècle)

Sur le penchant des Apennins,
Naquirent, un beau jour, deux fontaines limpides;
Leurs flots étaient vifs et rapides,
Et suivaient différents chemins.
Un laboureur vivait au voisinage,
Possesseur heureux d'un vallon
Fertile en riante moisson,
Abondant en gras pâturage.
Errant sur la montagne, un matin il les vit,
Et de l'une des deux voulut régler la course.
D'une main sage il trace un nouveau lit;
Il écarte avec soin toute bourbeuse source.
Sur le sable argenté coule paisiblement
Dun bienfaisant ruisseau le cristal transparent.
Il répand en tous lieux une nouvelle vie :
Ici, par son secours, s'élève un arbrisseau,
La s'offre a l'œil surpris une rive fleurie;
Plus loin, du laboureur l'agréable prairie
S'embellit des faveurs du tranquille ruisseau.
Chaque flot qu'il promène est un bienfait nouveau.
Dans sa marche, sa sœur ne fut point gouvernée;
Livrée à son caprice, à ses penchants pervers,
Elle mêla ses flots à mille flots divers:
D'abord elle fut entrainée
Sur des terrains sauvages et déserts;
Mais bientôt, parcourant de riches paysages,
Changée en torrent furieux,
Elle porta partout les plus affreux ravages;
La mer seule dompta son cours impétueux.
A l'aurore de nos années,
Puisse un guide prudent, ami du vrai bonheur,
Par de sages conseils, régler nos destinées,
Vers la pure vertu diriger notre cœur !

Livre II, Fable 1




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