La Fourmi ailée Théodore Lorin (19è siècle)

« Quoi ! disait la fourmi, cette mouche légère,
Qui tout le jour en bourdonnant,
A son gré, rôde sans rien faire,
A des ailes, et moi, soigneuse ménagère,
Du matin au soir travaillant,
L'injuste et marâtre nature
Me prive de l'utile et commode ornement
Qu'à cette sotte créature
Elle a donné si libéralementl »
Jupiter exauça ce souhait imprudent.
L'insecte dans les airs s'envole à tire-d'aile ;
Mais bientôt il se sent saisir
Par une féroce hirondelle
Qui, tout vivant, l'emporte pour nourrir
Sa naissante et faible couvée.
« Ah ! se dit la fourmi, si, sage, résignée,
Et me soumettant à mon sort,
J'avais pu me résoudre à vivre terre à terre,
Dans mon asile obscur j'aurais pu me soustraire
Aux horribles douleurs de cette affreuse mort. »

Livre VI, Fable 8




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