La Sauge et le Thé Théodore Lorin (19è siècle)

Contre le thé la sauge disputait.
En sa faveur elle citait
L'autorité d'une école savante
Qui déclarait que les humains
Ne devraient point mourir, puisque dans leurs jardins
Le ciel daigna placer cette, admirable plante.
En revanche le thé vantait
Le doux parfum que sa plante exhalait.
« De savants médecins prônent ton excellence,
Disait-il d'un ton fat : eh bien, de mon côté,
Tout en respectant leur science,
Je pourrais opposer à leur autorité
Non-seulement celle de l'Angleterre,
Mais celle de la France et de l'Europe entière.
Je suis fêté dans les plus beaux salons,
Tandis que tu languis sur les obscurs rayons
De l'herboriste ou de l'apothicaire. »
La sauge, à mon avis, si l'on n'eût consulté
Que son mérite et son utilité,
Eût été proclamée une plante divine ;
Pourtant à son rival on adjugea le prix.
La raison en est simple : il venait de la Chine.
Nul n'est prophète en son pays

Livre V, Fable 18




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