Le Thé et la Sauge Antoine Le Bailly (1756 - 1832)

La Sauge sur les mers fit rencontre du Thé,
Comme il arrivait de la Chine.
-Eh, bonjour ! où vas-tu ? lui dit la pèlerine.
—En Europe, ma bonne, où je suis tant fêté.
Mais ne puis-je savoir moi- même
Où tu vas ? À la Chine. -À la Chine, dis-tu ?
-Oui, car c'est un pays que j'aime ;
On y connaît mon prix, on vante ma vertu.
Mais en Europe, hélas ! quel était mon partage !
On m'y traitait d'herbe sauvage.
Ainsi je rends grâces à Dieu
D'avoir entrepris mon voyage.
On m'estime à la Chine, et j'y cours vite ; adieu. –
Indignés des affronts d'une ingrate patrie,
Combien n'a-t-on pas vu de talents précieux
Aller enrichir d'autres lieux
Des trésors de leur industrie !

Livre III, fable 9




Commentaires