On attendait les ennemis,
L'argent était caché, les trésors enfouis.
Un capucin, porteur d'une cassette,
Fut arrêté par un voleur.
Ce coffre m’appartient sans que je te l’achète;
Halte la, lui dit-il, mon beau prédicateur,
Ou je te brûle la moustache
Et te fais sauter la ganache.
Le père dit : je reconnais ta loi,
Voila l'objet, ensuite écoute-moi:
On doit me confier une boite pareille,
Et qui nous convient à merveille ;
Si tu consens que je sois de moitié ;
J'ai vu l’argent, le sac est tout lié.
Le maitre de cet or veut le placer en ville
Pour être plus tranquille;
Tl ne me confierait plus rien
Si ma fidélité ne se prouvait pas bien.
Tire-moi, dans ma casaque,
Ton fusil ou ton pistolet ;
Prends l’escopette et me la braque
Sur le revers de mon collet.
J'aurai l'air d’avoir fait tète
A la tempête ;
Il est bien entendu
Que m’étant défendu,
Ce sera chose des plus sires,
Quand mon habit montrera ses blessures;
Notre homme une autre fois me confiera son or,
Et nous partagerons ensemble le trésor.
Accepte ou refuse ;
Cette caisse est à toi, loin de moi cette ruse.
Fort bien, dit le voleur,
Or ¢a, tiens-toi, mon vieux, tu n’as pas peur ?
Ouvre-moi ta robe bien large,
Qu’a l'instant même je décharge
A droite à gauche mes deux coups.
Pan, pan, bon pour deux trous;
Encore, dit le père,
Elargissant sa haire;
Oh! mais je n’ai plus rien,
Dit le larron; dans ce cas, tout va bien.
Tu mas pris pour un bon apôtre,
Dit notre capucin : un homme en vaut un autre ;
Approche et tu verras beau jeu :
Je ne craignais que l'arme à feu.
Adieu donc, tu n’es qu'une bête,
Et tu n’auras pas ma cassette.
Pour sortir de danger sans douleur et sans bruit,
La force ne vaut pas la présence d’esprit.