L'Épée et le Fleuret Théophile Deyeux (1799 - 1870)

Le fleuret dit un jour à l’épée :
Vous voila donc encor de sang toute trempée ;
Que je plains votre sort !
Il fait de vous un instrument de mort ;
C’est une horreur, oui sur mon âme,
Ah! c’est affreux pour une femme.
Au moins j’ai soin de m’arranger ;
Moi, pour éviter le danger,
J'agis avec prudence ;
Le crime n’a jamais chargé ma conscience.
— Le crime est ton ouvrage, et n’est jamais le mien,
Répond l’épée; il te sied bien,
Quand tu leur fais de la mort une étude,
Et de combattre une habitude,
De venir me reprocher à moi,
Le mal qui ne vient que de toi.

On voit tes pareils, dans le monde,
Ourdir des complots à la ronde ;
Ils donnent pour le jour fatal,
Le Brûlot, l'heure et le signal ;
Ils ont tout fait par leurs paroles,
Distribué, soufflé les rôles,
Et viennent, d'un maintien froidement imposteur,
Nous crier à l'horreur !!

Fable 10




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