Fière de son pouvair l'épée étincelante
Étalait sur ses pas une pompe insolente :
Au milieu des transports, d'un ton audacieux,
Elle osait s'égaler à l'empire des Dieux :
Sans moi, point de vainqueurs, dit-elle avec audace
Produite par les Dieux, j'en brave la menace ;
Compagne du dieu Mars, j'affronte les combats,
Je sais donner la mort et ne la reçois pas,
Quiconque me connaît, sait défendre sa vie.
Je suis l'âme, l'appui du guerrier qui s'y fie ;
Le seul espoir enfin du soldat abattu :
Toujours à me servir on trouva la vertu !
Sans fin parlait l'épée, et d'un air de jactance,
Partout elle vantait ses exploits, sa vaillance :
Un jour, portant ses pas vers les paisibles champs,
Elle y croyait trouver de nombreux partisans :
Vain espoir ! Il n'est rien dans la plaine rustique,
Pour vanter à son gré son pouvair despotique ;
De dépit contre un soc se prenant follement,
— Que fais-tu dans ces lieux, triste, pauvre instrument ?
Tu languis méprisé, vil dans la poussière,
Tu traînés en tout temps, ta pénible carrière ;
Sous le joug asservi, c'est là tout ton bonheur ?
Mais que recueilles-tu, dis-moi, de ce labeur ;
Ah ! Il faut l'avouer, ton sort est déplorable ?
— Grande épée, il est vrai sans être désirable.
Mon sort mieux que le tien ignore le danger,
Toujours si je n'ai rien qui puisse le changer,
J'aime bien mieux ramper humblement sur la terre,
Que d'unir mon tranchant aux foudres de la guerre :
Oui, j'aime mieux cent fois, dans mes sillons certains,
Et servir mon pays et servir les humains.