Le Lion et l'Ours Victorin Fabre (1785 - 1831)

« On maudit mes exploits qu'on a devant les yeux,
S'écria le lion, certain jour de victoire ;
On les élèverait aux cieux
S'ils n'étaient plus que dans l'histoire.
- Ah, sire, ils y seraient si beaux !...
Dit un ours, vieux penseur. L'œil craint, mais la mémoire
Admire les grands rois, sans perdre le repos.
Singes, lapins, moutons, ce public à troupeaux,
Sujet, sous votre règne, à des terreurs iniques,
Ades oreilles de héros
Pour braver le récit des morsures antiques.
Il n'est point de loups historiques
Dont il n'aime à grossir les fameux coups de dents ;
Et, d'un culte intrépide, il prodigue l'encens
Aux dogues des temps héroïques.
Traité vous-même, un jour, comme ces grands rivaux,
Vous serez, ô mon roi ! pour prix de vos conquêtes,
Le Jupiter tonnant des poltrons et des sots.
Gens heureux qui de vos tempêtes
N'entendront plus que les échos ! »

Fable 32




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