Comment li Lyons mena chacier le Torel, la Vache et la Brebis, et prirent un Cerf Ysopet II (Moyen Âge)

Un lions orgueilleus
Cruel et envieus
Si volt aler chacier :
Un chevrel esgarda
A qui il comanda
Qu’il li venist aidier.

La vache et la brebis
En a aussi requis
Qui volentiers y vont ;
A la voie se metent,
Tous et un et s’apprestent,
Plus long séjour n’i font.

Un cerf ont encontre :
Tout quatre l’ont frapé
Tant que il l’ont occis :
Quatre quartiers en font,
Porce que quatre sont :
Devant eux les ont mis.

Seignor, dit le lion,
Oiez que nous ferons :
Je veil ce cerf partir.
La première pai'tie,
Je l’ai bien desservie,
Qui ne vouldra mentir.

Pour quoi que je sui roi,
Raisons est, par ma foy,
Que j’aie la seconde :
La tierce, le plus fort
L’aura, je m’en accort,
Se n’en suis-je mécompte.

La quarte qui voudra
Touchier, il morra:
Entendez vous ce compte,
Le lion, parmaistrie,
Ot tout en sa baillie.
Entendes que ce monte.

Qui est en compaignie
D’un cruel plain d’envie
Ne puet avoir fors lion :
Quant il a gaagnié,
Et il est haut et lié,
Si vient son compagnon,
Qui prent tout en sa part
Et l’apele musart ?
Et traître et glouton.

Tiré du le livre Fables inédites des XIIè, XIIIè, XIVè siècles et Fables de la Fontaine, par A.C. M. Robert, 1825, p.36


Fable IX

Notes

Je m’en accort : j’en suis d’accord
Mécompte : mécontent
Maistrie : pouvoir
Baillie : possession, puissance
Hon : honte
Lié : joyeux, de loetus
Musart : sot, débauché


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