Comment une Chienne prains emprunta le lit d'une autre Chienne pour chaaler Ysopet II (Moyen Âge)

Une chienne prenant
Vit un autre gisant,
Son lit li a requis,
Poux’ Dieu, qu’il li prestast,
Tant qu’elle chaaillast
Ses chaaillons petis.

Cele en ot grant pitié :
Son lit li a laissié,
Et cele y faonna :
Et quant elle vequist
Que son lit li rendist,
Cele la ramposna.

Po d’amor m’avez fet,
Encor nului ne vet
De mes petits faons ;
Or me volez chacier :
Certes po m’avez chier;
Le séjour n’est pas long.

Quant je le vous prestav,
Dit l’autre, par ma fay,
Ce ne fu qu’a une heure :
Or y avez esté
Quatre longs jours d’esté :
N’est-ce pas grant demeure ?

Puisque je n’en ai grez,
Plus n’y demourerez,
Par la foy que vous doy
Or tost vuidez mon lit :
Vous n’y gerrez a nuit,
Si aist Diex a moy.

Certes, se fussent grans,
Dit l’autre, mes enfants,
Por toy ne m’en partisse ;
Mais or, m’en partirai,
Et si te mercirai
Encor ceste franchise.

Gardez vous de prester
Et du vostre livrer
A gent de male foy :
Car jà gré n’en sauront,
Et rendre ne 1’ voudront,
Pieçà qu’esprouvé soy.

Tiré du le livre Fables inédites des XIIè, XIIIè, XIVè siècles et Fables de la Fontaine, par A.C. M. Robert, 1825, p.117


Fable XXVII

Titre complet : Comment une Chienne prains emprunta le lit d'une autre Chienne pour chaaler, et elle li prestal volentiers

Notes

Prenant ouprégnant : grosse, pleine
Chaaillast : mit bas
chaaillons : petits
Faonner :; mettre bas; se dit aujourd’hui pour les cerfs, les daims
Ramposna ou remposna : se moqua, gronda
Faons : petits
Aist Diex : Dieu m’aide
Pieca : autrefois, après que, il y a peu que


Commentaires