La Brebis et le Buisson Antoine Houdar de La Motte (1672 - 1731)

Quelques-uns veulent que la fable
Soit courte : ils ont raison ; mais l'excès n'en vaut rien.
Qui dit trop peu, ne dit pas bien ;
L'aride n'est point agréable.
Esope même était trop sec ;
Je m'en étonne ; car tout Grec
Est grand parleur : témoin notre divin Homère.
Ces deux conteurs ne se ressemblent guère
L’un par des vers sans fin dit qu’il faut s’accorder.
À l’autre allez le demander ;
En deux mots il vous expédie.
Ces deux extrémités ne sont point de mon goût.
Évitez, c’est bienfait, la longue rapsodie ;
Ne dites rien de trop ; mais aussi dites tout.
La Fontaine a bien fait d’étendre
Son laconique original.
Tout fleurit dans ses vers ; le plus vil animal
Est éloquent : c’est plaisir de l’entendre ;
Tout prend des sentiments, des mœurs ;
Tout converse ; on y croit être avec ses semblables.
Le précepte à loisir se coule sous les fleurs ;
Sans cela que servent les fables ?
Voilà mon maître, et j’en fais vanité ;
Sur son exemple et son autorité,
Je donne à mes récits toûjours quelque étenduë.
Voici pourtant une fable nuë,
Pour le seul intérêt de la variété.

Une Brebis choisit, pour éviter l’orage,
Un buisson épineux qui lui tendait les bras.
La Brebis ne se mouilla pas ;
Mais sa laine y resta. La trouvez-vous bien sage ?
Plaideur, commente ici mon sens.
Tu cours aux tribunaux pour rien, pour peu de chose.
Du temps, des frais, des soins ; puis tu gagnes ta cause.
Le gain valait-il les dépens ?

Livre III, fable 10


Que de généralités inutiles dans cette introduction...



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