Sur les genoux de la Fortune,
Emile assis un jour,
Emile aussi beau que l'Amour»
Et de plus sans malice aucune,
Souriait en mangeant la grappe de raisin
Que lui présentait l'inconstante
Qui, pour l'encourager, d'une mine obligeante,
Lui disait : pique, enfant, grapillc à pleine main.
Emile, bien on pense,
S'en donna de telle façon,
Que le pauvre garçon,
Comme un petit baril, avait rempli sa panse.
La fortuné, d'en rire, et de le provoquer ;
Pique, mon chérubin, pique, lui disait-elle ;
Courage, allons encor, la grappe est toujours belle.
C'est assez, lui dit-il, je ne veux plus piquer.
La fortune volage
Plante là notre enfant,
Le caresse, l'embrasse et dit en s'êloignanl :
De tous mes favoris voilà bien le plus sage.
Qui mord à ma grappe une fois,
Ne s'en tient pas au nécessaire ;
Dans son avidité, son ardeur grapillaire,
Dût-il en étouffer, il mange jusqu'au bois,
Et, bien souvent encor, se mord le bout des doigts.