J'ai vu (mon père) un lion en sculpture,
Lui, le plus fort des animaux,
Porter humblement sur son dos,
Un tout petit enfant d'une aimable figure.
L'Enfant, en marbre aussi, au ciel levait les yeux :
D'une lyre il tirait des sons harmonieux ;
Le Lion écoulait cette douce harmonie ;
Son oreille, ravie,
Donnait à tout son être un si doux sentiment,
Qu'on l'aurait caressé, je crois même vivant.
Ce sujet me parait incroyable.
— Cependant, mon, cher fils, ce n'est point une fable.
Loin de là, c'est la vérité.
Le Lion c'est la force, et l'enfant le génie
Devant lequel la force plie.
Par cet Enfant du ciel le Lion est dompté.
Dans les malheurs, cette lyre console :
Quand Dieu l'a fit vibrer, sa divine parole
Conquit tout l'univers ;
Des peuples opprimés elle brisa les fers !
Le génie, oh ! mon fils, c'est le ciel qui le donne ;
C'est la plus honorable et plus belle couronne
Qu'il place sur le Iront de l'Enfant au berceau,
Quoiqu'il ne soit encor qu'un fragile rameau,
Cet Enfant doit plus tard combattre l'injustice ;
Glorifier son Dieu, sa patrie et l'honneur ;
Ne jamais s'abaisser au rôle de flatteur,
Stigmatiser le vice.
Puissent les rois ressembler au lion,
Honorer le génie,
L'élever, le placer sous leur protection !
C'est le sujet de celle allégorie.
Puisse-tu ressembler à ce petit enfant
lorsque tu seras grand.

Livre III, fable 16




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