Marengo, c'en est lait, la carrière est finie :
Tu m'as quitté, c'est pour la vie.
Je ne te verrai plus, mon bien cher petit chien ;Il est rompu, ce doux lien !
Un jour, je m'en rappelle,
Tu fus hargneux et désobéissant.
Je te frappai !... Larmes mouillèrent la prunelle ;
Et tu me dis, dans un plaintif aboiement ;
« L'instinct, voilà ce que le ciel nous donne,
Nous ne pouvons enfreindre cette loi ;
Il faut rester ce que nous sommes : mais loi ?
De la raison tu portes la couronne.
C'est le souffle divin qui t'anime en naissant ;
Le céleste flambeau qui te guide et l'éclaire,
Qui remonte vers Dieu, source de la lumière
Et qu'il faut rendre au ciel, au dernier jugement.
Armé de la raison, tu combats tous les vices ;
Tu foules aux pieds les passions,
De la vertu lu connais les délices ;
Ces bienfaits, nous les ignorons.
Enfant, retiens bien ce langage ;
Il te rendra plus lard, plus patient, plus sage.
Quand il faudra chasser de ton cœur un défaut,
Souviens-toi du chien Marengo,
De l'amitié ce beau modèle,
Qui jamais ne cherche et flatter ;
Qui, dans l'adversité, nous reste encore fidèle,.
Fais en sorte de l'imiter.
Ne dis jamais : c'est un défaut de caractère,
Je dois, comme la brute, en suivre le penchant ;
Dis plutôt le contraire.
Corrige-loi, ton bonheur en dépend.