Chacun son goût, dit chez nous la chanson.
Corydon l'avait dit beaucoup mieux dans Virgile.
Mais quel est le meilleur ? Voilà la question
Que de résoudre il n'est pas très-facile ?
On dit qu'un bon avis souvent seul en vaut mille,
Écoulons sur ce point certain Aliboron,
Peut-être il résoudra l'affaire.
Il faisait, à son ordinaire,
Son repas, paissant le chardon ;
Lorsque, tout près, il voit ;' sur un buisson,
Une rose priritanière,
Rose même avec son bouton.
Oh ! oh ! dit-il, nouvelle chère !
Rose avec son bouton !... Eh mais...
(Déjà, pour mieux savourer le doux mets
Il a trois fois tourné la langue en son palais.)
Voyons ; dressant l'oreille, il vous gobe la rose
Et le bouton. Puis d'un air grave : eh quoi !
Quoi, dit-il, ce sont-là vos vrais morceaux de roi !
Votre reine des fleurs ! Ah quelle fade chose !
De moi si l'on veut que l'on glose,
Mais j'aime cent fois mieux le piquant du chardon.
Qui blâmera l'Aliboron ?
Ce ne sera pas moi, je-vous le jure ;
Comme le dit encore la chanson,
Tous les goûts sont dans la nature.