Un amateur habitant Rome,
D'un caractère très prudent,
Peignit comme un vrai gentilhomme,
Pour l'honneur, non pour de l'argent.
Un jour avec charme il dévoile,
Aux yeux d'un ami des beaux arts,
Ce qu'il avait peint sur la toile,
Qui représentait le dieu Mars.
Le connaisseur dit sans mystère,
Que le tableau ne lui paissait ;
Que son Mars pour un dieu de guerre,
Avait un air trop stupéfait.
Le Peintre tenace argumente,
Que son tableau est sans défauts !
Le connaisseur s'impatiente,
Sourit, et lui tourne le dos.
Alors un jeune homme s'avance,
Pour examiner le travail;
Dieu ! dit-il, quelle intelligence,
Quel joli pied et quel poitrail.
Mars est vivant ! voyez ce casque ,
Le soleil n'est pas plus-brillant ;
L'armure est bien, même la basque,
Est le produit d'un grand talent. »
Le Peintre alors touché de honte,
Au connaisseur, dit un peu tard :
« Je suis puni de mon mécompte,
Qu'augmente encore ce vantard.
A ce que vous dites j'adhère,
Du laid vous distinguez le beau ;
J'efface donc mon dieu de guerre,
Que représente mon tableau. »
Si ton livre déplait au sage,
Il est prudent de corriger |
Mais si le fou lui rend hommage,
Il est temps de le déchirer. »