Un riche brocanteur avait dans sa boutique
Du célèbre Van Dyck un portrait magnifique.
D'un jeune artiste le pinceau
Tout récemment avait reproduit ce tableau,
Et la copie, en cet endroit laissée,
Près de l'original était encor placée.
Fière d'un vernis éclatant,
De sa fraîcheur, de sa jeunesse,
La première montrait un dédain insultant
Pour son voisin, dont l'illustre vieillesse
Était l'objet de ses brocards :
« Avec ce teint flétri, disait notre railleuse,
Et cette peau noire, écailleuse,
Comment s'offre- t-on aux regards ? »
Un amateur, choqué de tant d'irrévérence :
« - Peux-tu de ce tableau, dit-il, ainsi parler,
Toi qui lui dois ton nom, ton existence,
Et dont tout le mérite est de lui ressembler ? »
Avis à bien des gens, qu'il me sera, j'espère,
Permis de ne pas signaler,
Dont le mérite aussi pourrait doubler
S'ils ressemblaient mieux à leur père.