Un fils du roi Lion, ignorant, abruti,
Indigne enfin du sang dont il était sorti,
Fuyait la cour du roi son père
Et faisait, chaque jour, des plus vils animaux
Sa société la plus chère.
Le compagnon, l'ami des ânes, des pourceaux,
Il avait pris leurs airs et jusqu'à leur manière
De se mouvoir, de grogner et de braire.

Les baudets enchantés disaient : « Il est charmant,
Comme il brait naturellement !
Quel malheur qu'il n'ait pas de plus longues oreilles !
On le prendrait pour notre enfant. »

Les pourceaux lui donnaient des louanges pareilles.
Notre lionceau, triomphant,
Et brûlant de montrer ses talents à son père,
En contrefaisant l'âne aborde le lion,
Et, pour plus grande illusion,
Le voilà qui se met à braire.
Le père fronce le sourcil :

« Je vois assez, mon fils, » dit-il,
Par ta démarche et ton langage,
De ta société le choix honteux et vil.

- J'ai pourtant, dit le fils, des talents en partage
Et suis victime, hélas ! de vos préventions,
Car, chaque jour, mon entourage
Et m'applaudit et m'encourage.
- En méritant, mon fils, leurs acclamations,
Va, toi-même tu te condamnes ;
Les applaudissements des pourceaux et des ânes
Sont des titres certains au mépris des lions. »

Livre III, fable 11




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