Les Colombes et le Milan Édouard Parthon de Von (1788 - 1877)

S'allier aux méchants, c'est assurer sa perte.

Les colombes et le milan
Vivaient, depuis longtemps, dans une guerre ouverte ;
Mais l'oiseau de Vénus, par son rapide élan,
Les détours de son vol, la force de ses ailes,
Échappait aux serres cruelles.
Voyant bien qu'autrement il ne peut réussir,
Le ravisseur a recours à l'adresse.
Au peuple roucoulant, en ces mots, il s'adresse :
« Faut-il donc toujours nous hair ?
Rester jour et nuit sous les armes
Et vivre ainsi dans les alarmes ?
Un intérêt commun devrait nous réunir.
Choisissez-moi pour roi ; ma force, ma puissance,
Vous défendront de toute offense ;
Vous pourrez en repos boire, manger, dormir. »
La colombe est simple et crédule :
Chacune accepte avec empressement.
Le tyran, les tenant enfin sous sa férule,
En croque une premièrement,
Pour célébrer le jour de son avénement ;
Le lendemain une autre ; ainsi de son empire
Chaque jour est marqué par quelque cruauté,
Et d'un meurtre nouveau son bec ensanglanté,
Ses sujets gémissants étaient forcés de dire :
« Le Ciel, hélas ! dans sa rigueur,
Nous punit justement de notre imprévoyance
Et d'une coupable alliance ;
Nous méritons notre malheur. »

Livre II, fable 10




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