Mes enfants, dit un jour
Une fauvette à sa jeune famille :
Je sors ; que pas un ne babille,
Se dispute encor moins ; dans les champs d'alentour
Je vais chercher de quoi vous nourrir la journée.
Disant ces mots, la pauvre infortunée
Leur donne à tous un baiser plein d'amour.
La petite nichée en bégayant lui crie
De n'avoir nul souci. Mais à peine partie
Sur le nid malheureux
La discorde ennemie,
Hélas ! s'en vient souffler ses feux.
L'aîné du nid fier d'un peu de plumage
Se croyant majeur de raison
Tranche du grave personnage,
Prétend gouverner la maison,
Fait pleurer l'un, fait crier l'autre,
Fait tant enfin le bon apôtre
Qu'un milan en passant l'entend,
Et, le cœur palpitant
D'une cruelle joie
Des petits innocents fait sur-le-champ sa proie.
La fauvete revient ; elle voit, ô douleur !
Tout son nid dévasté, mainte trace sanglante,
L'affreux ravage enfin de l'oiseau destructeur ;
D'horreur et de tristesse elle tombe expirante.
Jeunes enfants, voulez-vous être heureux ?
Désirez-vous couler des jours purs et tranquilles ?
Jamais présomptueux,
Aux avis paternels soyez toujours dociles.