Les deux Mariages Éliphas Lévi (1810 - 1875)

On lisait un journal (une feuille d'un jour),
Où, parmi d'autre verbiages,
On parlait de deux mariages,
L'un de raison, l'autre d'amour.
Une jeune pensionnaire
Se hasarde près de sa mère
À lancer le grand mot : Pourquoi
Ces deux noms, expliquez-les-moi !
- Ma fille, dit alors la mère,
Me charger d'expliquer ce pathos éphémère,
C'est vraiment une trahison.
Je ne sais ce qu'entend, libre penseur à gages,
L'écrivain dont l'esprit gambade sur ces pages ;
Mais pour le vrai bon sens qui garde la maison,
Un mariage de raison
Veut dire un mariage honnête.
L'amour, la passion, c'est la fatalité ;
La fatalité, c'est la bête ;
La raison, c'est l'humanité !

La jeune innocente, interdite,
Aurait pu répondre à son tour :
« Ma vieille tante Marguerite,
Vous n'entendez rien à l'amour ! »

Tout ceci nous explique un système du jour :
C'est qu'on cache les amours bêtes
Sous des mariages honnêtes.

Livre VI, fable 22




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