Hypatie et Sénésius Éliphas Lévi (1810 - 1875)

La fille de Théon, la divine Hypatie,
Au temps où de la charité
Par l'erreur fanatique et l'animosité
La lumière était obscurcie,
Passait paisible sur son char.
Des chrétiens furieux l'attaquent, la renversent,
La traînent à l'autel consacré par César ;
De ses vêtements qu'ils dispersent
Ils outragent la chasteté.
Le baptistère est prêt : - Allons, jeune païenne,
Reçois la mort ou sois chrétienne !
- J'admire de Jésus le noble enseignement,
Répond la platonicienne,
Mais j'admire encor plus son glorieux tourment,
Quand pour dompter la brute et pour affranchir l'âme,
Il meurt sur son gibet infâme !
Brutes qui confondez la force avec la loi,
Je suis libre, assassinez-moi !
J'abhorre les autels souillés par votre hommage.
Alors, avec des cris de rage,
On lapide la vierge, et de son vêtement
La sainte charité se couvre le visage.
Un évêque, un vieillard qui lutta vainement
Pour arrêter cette furie,
À la pauvre sainte meurtrie
Vient parler du ciel à genoux.
Par un regard sublime et doux
La fille de Théon, que la vie abandonne,
Lui répond seulement et lui dit : - Je pardonne !
Alors, Synésius, l'évêque illuminé,
O vierge ! que ma mort soit semblable à la tienne !
Bourreaux ! inclinez-vous, car elle a pardonné.
Son sang l'a baptisée, elle est morte chrétienne !

Livre VI, fable 21




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