L'Hymen et l'Amour brouillés par le luxe Étienne Fumars (1743 - 1806)

L’Amour avec l’Hymen et par ville et par bourg
Jadis allaient d’intelligence ;
L’un battait le tambour,
L’autre enrôlait les cœurs amis de la constance ;
Au lieu d’or, deux baisers payaient l’engagement
On était riche alors, mais par le sentiment.
Heureux temps, tu ne duras guère !
Rarement l’union séjourne chez deux frères,
Et l’Hymen et l’Amour vivent séparément.
Le Luxe, ce fantôme aux cent brillantes têtes,
Par la vaine inconstance habillé de clinquant,
De mille mains prodiguant leur argent,
Ordonnant chaque jour des repas ou des fêtes,
Fit naître au milieu d’eux les besoins dévorants,
Les peines, les soucis et les regrets cuisants.
L’Hymen sentit le prix de la richesse ;
Il rejeta l’Amour, s’unit avec Plutus.
Sous ses drapeaux on ne vit plus
De ces beaux cœurs créés pour la tendresse,
Riches en force et parés de vertus :
C’était des cœurs usés par la mollesse,
Tout brillants d’or et de pourpre vêtus.
Pour lui, tout fier de ses troupes nouvelles,
Et dédaignant des sujets plus fidèles,
Il marche en téméraire et brusque tout hasard :
Mais le dégoût paraît… il n’est plus de courage ;
Tous les cœurs du divorce arborent l’étendard.
Tout a trahi l’Hymen, tout le fuit ou l’outrage.
Il succombe… O regrets ! Quelques fidèles cœurs
Par l’amour engagés vont essuyer ses pleurs.
Ah ! dit le dieu, malheureux mais plus sage,
Choisis les cœurs, Amour ! c’est ton ouvrage.





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