Un Lièvre était aveugle de naissance;
Il vivait de charité.
Tout confiant dans la Divinité,
« De Dieu j'attends l'assistance,
Disait-il chaque matin
Et toujours la Providence
Daignait pourvoir à sa soif, à sa faim.
Un Singe en prit jalousie.
« Enseignez-moi, dit-il, par quel moyen, e
Sans travail, sans industrie,
On peut ne manquer de rien.
Moi, pour soutenir ma vie,
Je me fatigue, je cours,
Et ne mange pas toujours.
Comment faites-vous ? « Je prie ;
De Dieu j'attends les secours. »
« C'est un métier fait pour plaire,
Reprit notre paresseux ;
Il me conviendrait au mieux ;
Troquons ensemble nos yeux
Avec les miens vous verrez la lumière
Moi, je renonce à la clarté des cieux,
Et je vivrai sans rien faire. »
Marché conclu Notre aveugle nouveau
Étudia son rôle et sa prière.
Le premier jour il vécut à gogo.
Le lendemain notre tête légère
Oublia tout, reprit. son caractère ;
Sans employer la formule ordinaire,
Il dit à Dieu, jurant comme un païen
« Dieu, donne-moi. Dieu ne lui donna rien