Le Lièvre et les petits Oiseaux Fables Sénégalaises

DES richesses, du pouvair
Des talents et du savair,
Plus on en a, plus on en veut avair.

De tous les animaux, le Lièvre, au pied agile,
Est certes bien le plus malin.
Il demandait Dieu de le rendre plus fin
De le rendre encor plus habile.
Pour le congédier, Dieu lui dit: « De moineaux
Lorsque ta gourde sera pleine
Tu reviendras me voir. » - Le Lièvre, fort en peine
Sur cette épreuve-là méditait en repos,
Couché le long d'une fontaine,
Survient en folâtrant une bande d'Oiseaux
Qui s'abat près de l'onde claire,
Elle y joue et s'y désaltère.
« Voilà, pensa-t-il, mon affaire,
S'ils veulent mordre à l'hamecon. »
Puis il dit plusieurs fois, d'un ton plein de mystère
« Non, non, oui, oui, non, non, cela ne se peut guère ?
Non; oui, cela se peut. » « Oui, non
Que dites-vous donc là, compère ?
Lui demanda la Gent babillarde et légère.
« Je voudrais, reprit-il, savair si j'ai raison,
Et si ma gourde est assez grande
Pour pouvair vous contenir tous.
Essayons-en, le voulez-vous a »
Nous y tiendrons belte demande »
« Gageons que vous n'y tiendrez pas »
Nos Oisillons d'entrer, un, deux, toute la bande.
Le Lièvre les enferme et porte son offrande,
Fier de sortir d'un mauvais pas.
Mais Dieu, lui frappant sur la tête,
Lui dit « Néant à la requête.
Halte-là, mon rusé coquin,
Ta cervelle en malice est déjà trop féconde ;
Si je te rendais plus malin,
Tu bouleverserais le monde.

Fable 25




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