D'un Roi des Phrygiens on fait le piteux cas.
Dans ces temps féconds en merveilles,
Pour avait préféré le chant de Marsyas
À celui d'Apollon, il lui vint deux oreilles,
Longues oreilles d'Ane, hélas !
Qu'à dérober aux yeux le pauvre Roi Midas,
Jour et nuit s'occupait avec un foin extrême.
Un faquin de Barbier (le Roi ne savait pas
Par malheur se rafer lui-même)
S'aperçoit un beau jour
De ce honteux mystère,
Le confie à la terre,
Qui le dit à son tour
Aux roseaux d'alentour :
Et c'est par leur organe
Qu'on apprend que Midas a des oreilles d'Ane,
Midas, le Roi Midas.
Ô vous qui que vous puissiez être,
Qui vous trouvez à peu près dans le cas
Des oreilles du Roi Midas,
Un Barbier, des roseaux peut-être
Ne vous trahiront pas ;
Mais si vous êtes Roi, gardez-vous bien de croire
Que la terre l'ignore ; elle en parle tout bas,
Et malgré vous l'histoire
Bientôt
En parlera tout haut.