À la cour du roi des forêts,
Un écureuil prit du service.
Comment ? Pourquoi ? Pour quel office ?
Ce sont détails restés secrets.
Sans plus, il nous devra suffire
De savair que du roi son soin était prisé ;
Assurément, c'est assez dire,
Car plaire au roi lion n'est pas toujours aisé.
Pour ses gages on lui propose
Des noisettes plein un chariot.
(Je dis qu'on les promet ; donner est autre chose.)
Le temps passe, et bientôt il n'en est soufflé mot.
La pauvre bête, à jeun, souffrait souvent martyre,
Et pourtant, malgré ses douleurs.
Devant le roi cachant ses pleurs,
Le ventre creux, il devait rire.
Dans le verger voisin, hélas ! mon écureuil
Voit ses amis sur la coudrette
Passer et repasser, en cueillant la noisette,
Et, sans pouvair bouger, les suit du coin de l'œil.
Là-bas, on croque, on croque ; à ce bruit qui l'invite,
Il fait un pas, puis deux, vers le friand jardin ;
11 regarde en arrière, il s'élance, et soudain
Le roi l'appelle et gronde : il faut rentrer bien vite !
L'âge arrivait. Le roi, de ses soins dégoûté.
Le met à la réforme, et, pour payer ses dettes,
Lui donne un plein chariot de noix et de noisettes.
C'étaient fruits merveilleux, d'exquise qualité,
Dans les bons crus cueillis par ordre ;
Mais le pauvre amateur de noix
N'avait plus de dents pour y mordre.
Qui donne à temps donne deux fois.