Le Cerf-volant Ivan Krylov (1768 - 1844)

Fier de se voir lancé dans la céleste plaine,
Un cerf-volant criait au papillon léger
Qu’au fond de la vallée il voyait voltiger :
« Le croirais-tu, mon cher, je te distingue à peine.
Tu dois être jaloux, dis-moi, lorsqu’à tes yeux
Je vais ainsi planer dans les hauteurs des cieux.
— Moi, jaloux ? Vraiment non; je vois trop où t'entraine
L'erreur qui fait ta vanité.
Si haut que ton vol soit porté,
Ta liberté toujours par un fil t'est ravie.
Crois-moi, mon cher, tout bien compté,
C'est acheter trop cher le bonheur de la vie.
Hôte des fleurs, tout près du sol
J'ai fixé mon destin modeste ;
Je vole bien bas, mais, du reste,
Ou je veux je porte mon vol,
Et ne vais jamais sur ta trace,
D'un autre servant les plaisirs,
Produire un vain bruit dans l’espace
Pour amuser de sots loisirs. »

Livre IV, fable 9




Commentaires