Le Berger et les Canards Jacques Cazotte (1719 - 1792)

Chantez, oiseaux, calmez ma peine;
Rendez mon sort moins rigoureux.
Je languis dans les fers d'une belle inhumaine,
Chantez, oiseaux, vos chants mélodieux
Peuvent seuls adoucir la tourment qui me gêne.
Trop maltraité par son Ismène,
C'est ainsi qu'un berger, au bord d'une fontaine,
Aux disgrâces de son amour,
Intéressait les oiseaux d'alentour.
Déjà l'aimable Philomène,
Sensible aux maux du tendre amant,.
Préludait un air languissant.
Chaque oiseau préparoit une chanson nouvelle.
Près de là, dans un noir bourbier,
Des Canards la bande étourdie
Crut que c'était de son gosier
Qu'on implorait la mélodie.
« Chantons, dit la troupe à l'instant.
A tout autre intérêt fût-on inaccessible,
Aux malheurs d'un amant il sied d'être sensible. »
Bientôt, tout retentit de leur maudit quanquan.
L'écho répète au loin cette musique horrible;
Les oiseaux, effrayés, interrompent leurs chants.
« Ah, cessez vos tristes accents !
Dit le berger : oiseaux, faits pour vous taire,
Laissez aux rossignols le soin de me distraire,
Vous redoublez encor les maux que je ressens.

Fable 26




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