Le Pinson et la Vigne Jean-Aimé Gaudy-Lefort (1773 - 1850)

Oh! que d'une allégresse vive
Me remplit Mars vers son déclin !
Lors tout renaît, tout se ravive ;
De nos beaux jours c'est le matin.

Déjà dans mes carrés s'étale
L'hépatique en bouquets nombreux,
Et la couronne impériale
Y dresse son front orgueilleux.

Le merle appelle son épouse ;
L'olive embellit mon sentier,
La pâquerette ma pelouse ;
Je vois fleurir l'abricotier.

Sur ce bois léger du mélèze
Qui prête à nos ceps son appui
Ainsi que moi transporté d'aise,
Un Pinson chantait aujourd'hui.

Peu d'art avait sa mélodie ;
Rien de savamment apprêté ;
Mais sa note franche et hardie
Peignait une aimable gaîté.

La chansonnette terminée,
Près de la Vigne il descendit ;
Et la voyant de pleurs baignée,
En son doux langage il lui dit :

Quoi ! dans ce moment plein de charmes,
Tout chagriné ton cœur paraît !
Bonne Vigne, pourquoi ces larmes ?
Quel est ton déplaisir secret ?

Aucun chagrin, répondit-elle,
De mon cœur ne trouble la paix ;
L'aspect de la saison nouvelle
Est pour moi toujours plein d'attraits ;

Mais du pinson, de l'alouette,
N'ayant point les heureux accents,
Ma reconnaissance muette
Par des pleurs offre son encens.

C'est là l'hymne qu'au ciel j'envoie
Quand de ses dons vient le retour
On peut aussi pleurer de joie,
Et de gratitude et d'amour.





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