Les deux Colimaçons Jean-Aimé Gaudy-Lefort (1773 - 1850)

Oh ! qu'un moderne fabuliste
Sous les traits du colimaçon
Naguère a bien peint l'égoïste !
La bonne et piquante leçon !

C'est en relisant cette fable,
Car je reprends assez souvent
L'œuvre de son auteur aimable,
Que je fis le croquis suivant :

Après une averse propice,
Dont nos guérets longtemps flétris
S'abreuvèrent avec délice,
J'errais dans mes jardins fleuris,

Quand je vis sous les buis humides
Deux beaux jeunes colimaçons,
Manifestant leurs mœurs timides
Par de singulières façons :

L'un vers l'autre, sous leurs coquilles,
Tout doucement ils s'approchaient,
Et de leurs deux cornes mobiles,
Comme pour jouer se touchaient.

Puis cette trompe délicate
Vite rentrait dans son étui.
De l'animal c'est là la patte,
L'œil et le bras, l'unique appui.

Ensuite une sorte de flèche,
De javelot qu'on se lançait,
Faisant une petite brèche,
De chacun d'eux le col blessait.

Fort étonné de ce manège,
Et voulant m'en rendre raison,
Que faites-vous ? leur demandai-je
En me baissant vers le gazon.

L'amour, dit une voix doucette.
- Comment ! répondis-je à mon tour,
Vous que d'égoïstes l'on traite,
Aussi vous songez à l'amour !

Eh ! ne sais-tu pas qu'une dame,
Très-célèbre, reprit l'un d'eux,
A dit que cette ardente flamme
N'est que de l'égoïsme à deux ?





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