Aux bords que la Brenta baigne d'un flot docile,
Dans le tronc d'un vieux saule, enfant chéri des eaux,
D'une Belette était le domicile,
Et tout auprès, d'un massif de roseaux
Une jeune Sarcelle avait fait son asile.
Bon voisinage ; on s'entendait au mieux ;
Petits services, causerie ;
Rien de hautain, de pointilleux.
La Sarcelle pêchait dans le flot poissonneux,
Et la dame Belette allait par la prairie,
Chasser aux taupes, aux mulots,
Aux campagnols, tous méchants animaux,
Qui dans nos champs font du dommage.
« Moi, des perdrix saigner les tendres rejetons !
Dans leurs nids porter le ravage !
(Disait-elle un jour sous l'ombrage)
Tuer des pigeonnaux, d'innocents cannetons !
Non, non ; respect à la gent emplumée.
Mes sœurs ont, je le sais, mauvaise renommée ;
De leur appétit seul elles suivent la loi ;
Telle je ne suis point, voisine ;
Ainsi, pondez en paix sous l'arbre qui s'incline,
Soignez votre couvée, et fiez-vous à moi. »
La pauvrette écouta cette langue dorée ;
D'un nid, sans défiance elle fit les apprêts ;
La ponte eut lieu.... huit jours après,
La famille était dévorée !
Survint un vieux canard, de ceux de la contrée
Le plus madré, comme le plus ancien,
Qui dit à la mère éplorée
Ce bon dicton vénitien :
Di chi mi fido guarda mi, Dio ;
Di chi non mi fido mi guarderò, io.