Las de vivre isolés, d'errer de tout côté,
Différents animaux, de région lointaine,
Voulurent à la fin vivre en société.
Pour mieux parer les coups de la nécessité,
C'était le vrai moyen, oui, la chose est certaine :
En conséquence donc tout fut organisé
Et leur gouvernement fut, dit-on, monarchique.
Mais pourquoi pas la république ?
Répondre à ce pourquoi n'est pas du tout aisé,
Quand plus d'un peuple encor nommé civilisé
Est courbé sous le joug du pouvair despotique.
D'ailleurs, je ne veux point aller vous dire en vers
Des constitutions les éléments divers.
Bref, ce gouvernement leur parut préférable.
C'est vers un autre but que je vise en ma fable.
Je vais donc essayer de vous y faire voir
Qu'en la société, n'importe son régime,
L'injustice souvent s'associe au pouvair.
Un loup s'était souillé d'un exécrable crime ;
Tout le peuple en appelle à la rigueur des lois ;
Mais ce loup, de haute naissance,
Occupait dans l'état un des premiers emplois ;
Ce monseigneur le loup nageait dans l'opulence.
Or donc, en sa faveur ou forme le jury ;
On n'y voit figurer que loups du haut parage ;
Du peuple ces gens-là n'écoutent point le cri :
Le coupable est absous. De ce nouvel outrage
La justice gémit, et l'arrêt odieux
Qu'elle repousse en vain confirme cet adage :
Les loups jamais ne se mangent entre eux.