Un voyageur désirait le beau temps :
La pluie, aux voyageurs est très-souvent contraire :
Il adressait au ciel son ardente prière.
Un laboureur en même temps,
Priait de son côté, qu'une pluie abondante,
Douce, légère, bienfaisante,
Vînt arroser ses champs, fit promptement germer
Le grain qu'il venait de semer.
Jupiter, disait-il, à mes vœux sois propice !
J'invoque ta clémence, ainsi que ta justice :
Ce n'est pas pour moi seul, si mes vœux sont pressants,
C'est le bien général, je nourris tes enfants.
Le voyageur enfin, par un désir contraire,
Disait : Jupin, suspends l'orage et le tonnerre :
Quelques, beaux jours encor, c'est tout ce que je veux,
Pour arriver au but où tendent tous mes vœux.
Jupiter fatigué, disait : voilà les hommes !
L'un veut blanc, l'autre noir,
Ils changent du matin au soir.
Mais, comment, tout dieu que nous sommes,
Donner au même instant la pluie au laboureur,
Et le beau teins au voyageur ?
De par le Styx, la chose est impossible :
Qu'il pleuve sur les champs du laboureur sensible ;
Dût l'égoïste voyageur
Être mouillé, c'est un petit malheur.
Les désirs des mortels se contrarient sans cesse ;
Que de vœux indiscrets on accable les Dieux !
Mais celui qui sait tout, a tout fait pour le mieux ;
Livrons nos intérêts au soin de sa tendresse.