Sur la rive enchantée où l'erreur nous convie
Je cherchai trop longtemps le chemin de la vie.
J'interrogeais mon cœur, les hommes, univers,
Egarant ma pensée en ses vastes déserts.
Sur moi la vérité semblait parfois descendre.
Une voix s'approchait que je croyais comprendre ;
Mais d'autres s'élevant en murmures confus,
Je n'entendais personne, et ne m'entendais plus.
Je dis : « La vérité se plait aux solitudes.
Loin des savants du siècle et des folles études
Le fruit de sapience attend mes faibles mains.
Je le trouve à l'écart : je Y'apporte aux humains. »
Au murmure des bois d'un asile sauvage,
J'allai prêter l'oreille, et déjà me crus sage.
Sur moi dans se sommeil un songe descendit.
Il me semblait qu'un antre à mes yeux suspendu
Sur la pelouse en fleurs son arcade imposante.
De la grotte il s'échappe une onde jaillissante ;
Mais d'y puiser à peine a-t-on pris le plaisir
Que d'en chercher la source on éprouve un désir.
Jose étancher ma soif : sur moi le charme opère.
Ventre, et le jour d'abord me prête sa Lumière.
Après quelques moments, ô regrets superflus,
O terre, ton flambeau ne m'accompagnait plus.
Mon œil consulte en vain l'obscurité profonde.
J'avais fait quelques pas : la caverne est un monde.
J'allais ouvrir mon cœur aux flammes du courroux :
Mieux inspire, je prie et je tombe à genoux.
Un ange m'apparait, et sublime et modeste.
Ses traits sont d'un mortel ; son langage est céleste.
I sourit ; il m'apporte un flambeau radieux.
« Tout autre s'éteindrait dans ces augustes lieux,,
Dit-il. De celui-ci la lumière éternelle
Ou finit votre jour est un guide fidèle. »
Ainsi je parcourus ces vastes régions.
Poètes, oubliez vos douces fictions.
La moindre vérité de cet aimable empire
Vaut toutes les erreurs que chante votre lyre.
Je marche, et chaque pas augmente mon bonheur,
Pâture délectable et nouvelle à mon cœur.
De prodige en prodige, au terme de ma course,
J'arrive où nait cette onde, et je puise à la source.
Dés ce moment heureux succéde à mes transports
Une divine paix. Plus de vœux, plus d'efforts.
Quel Saint m'ouvre ses bras ? C'est Jehovah lui-même.
Je l'entends ; je le vois dans un calme suprême.
Tl habite en mon cœur. Quelle félicité
De m'unir, sans me perdre, à sa divinité!
Ahi flambeau merveilleux ou plutôt sainte aurore,
Mon amour au réveil vous bénissait encore.
Et qu'entendis-je alors ? Aux rayons du matin,
Le temple m'appelait de son clocher lointain.
J'accours ; le bon pasteur m'exhorte et me conseille :
C'est lange et le flambeau ; c'est 1a Source, et je veille !

Livre XII, fable 12




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