Le Papillon et l'Abeille Jean-Louis-Marie Guillemeau (1766 - 1852)

D'une aile inconstante et légère
Amoureux de toutes les fleurs,
Un papillon parcourait un parterre,
Et dans le changement trouvait mille douceurs.
Même, dans sa flamme indiscrète,
On le vit et chercher et quitter tour- à-tour
Le souci, le muguet, le thym, la violette,
Sans trouver une fleur digne de son amour....
Apercevant la diligente abeille,
Qui, pour faire son miel, ce doux présent des dieux,
D'une rose fraîche et vermeille,
Sans relâche, exprimait le suc délicieux ;
Lestement il s'approcha d'elle,
Et d'un ton goguenard, d'un air malicieux,
Il se mit à railler ses talents et son zèle
Et ses travaux industrieux.
Sans abandonner son ouvrage,
L'abeille répondit à ce jeune imprudent :
Je n'ai, mon pauvre ami, le temps, ni le courage
De te parler en ce moment ;
Mais sache, et puisse un souvenir durable
S'en conserver longtemps dans le fond de ton cœur,
Que, pour être toujours aimable
Et pour connaître le bonheur,
« Il faut savoir unir l'utile à l'agréable. »

Livre I, fable 8




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