Le Chien et le Bœuf L-S du Ruisseau (16?? - 17?)

Un Bœuf lequel n'avait, ni grenier ni cuisine,
Possédé d'un faim canine,
Après avoir jeté ses regards mainte part,
Sans pouvoir rien trouver qui lui fut favorable,
Aperçût enfin par Hazard ,
Quelques botes de foin dans le fonds d'une étable.
Aussitôt il y court pour contenter fa faim,
Mais d'abord un puissant Mâtin,
Qui s'y trouva couché, se levant en furie
Avec des yeux étincelants,
Et par d'affreux aboiements ,
Fit que le Bœuf ne pût contenter fon envie.
Animal envieux, cruel et malfaisant,
Dit le Bœuf en se retirant,
A quel horrible excès portes-tu l'injustice,
D'aimer mieux que ce foin qui ne te sert de rien
Quelque jour devant toi périsse ,
Que de vouloir souffrir que j'en prenne un seul brin,
Pour pouvoir modérer les ardeurs de ma faim.

L'homme d'un naturel avare
A pour les Disetteux toujours un air barbare.
Il possède des biens, mais il n'en jouit point,
L'or est à son égard ce qu'au Chien est le foin.

Livre II, fable 3




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