Le Loup et le Renard L-S du Ruisseau (16?? - 17?)

Aux dépens de plus d'un Berger,
Un Loup avait fourni de Moutons sa tanière ;
Par là le drôle avait matière,
De faire maints repas sans peine et sans danger.
Un Renard son voisin se doutant de l'affaire,
Pour mieux s'en éclaircir alla le visiter :
Qu'est ceci, dit-il, mon Compère,
Doit-on vous plaindre, ou vous féliciter.
Auriez-vous fait un fonds à vie,
Ou bien quelque accident vous est-il arrivé ?
Car ce n'est pas mélancholie
Qui vous tient si longtemps au logis arrêté.
Le Loup qui vit d'abord le but de l'hypocrite,
Et qui de pareille visite,
Ne s'était jamais bien trouvé,
Repartit au Renard, Ami la maladie
Est feule l'unique raison
Qui me fait garder la maison :
Or comme le repos est utile à la vie,
Et qu'en pareille occasion
Il est propre à ma guérison,
Ne vient point me ravir ce repos, je te prie.
Par ce compliment le Renard
Connût qu'il se fallait adresser autre part,
S'il voulait faire sa fortune,
Et ne pas rendre au Loup fa visite importune.
Il fit donc avertir, mais indirectement
Le premier Berger d'un Village
Qu'un Loup à ses dépens de Brebis faisait rage,
Lequel en tel endroit avait fon logement.
A peine le Berger eût reçu ce message
Qu'il part accompagné de deux puissants Mâtins ;
Non pas tels que font les Doguins,
Mais des Chiens d'une taille énorme,
Expédiant les Loups en forme ,
Qui du premier abord se jetant fur le Loup
Vous l'étranglèrent tout d'un coup.
Par là maître Renard hérita de la proie.
Mais un jour que Monsieur s'en donnait au cœur joie
Le Berger le trouvant dans ce bel emploi là
D'un coup de bâton l'assomma.

Dans le Renard on voit l'image
De ces Gens envieux du bonheur du Prochain,
Lesquels pour un infame gain
Mettent tous moyens en usage,
Pour pouvoir débusquer un autre de sa charge
Mais qu'en arrive-t-il ? Si ce n'est que ce gain
Leur procure souvent une funeste fin.

Livre I, fable 3




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