Docile au frein qui guide son audace,
Un fier coursier s'en allait bondissant ;
Sur le sable son pied laisse à peine une trace.
Un écureuil l'accoste, et lui dit en passant :
« Beau sire, en vérité, j’admire ton adresse,
Ton pied léger, ta grâce, ta souplesse ;
Mais j’en sais faire autant que toi:
Soir et matin, a perdre haleine,
Je m’agite, je me démène,
Sans repos je travaille, et c’est un jeu pour moi. »
Du petit animal, respectant la folie,
Le cheval lui répond d’un air de courtoisie :
« Que mon maitre a ses lois soumette ma fierté,
Il s’en fait gloire, honneur : son éloge m’anime ;
Il reconnait mes soins, et ma docilité
Aime4faire pour lui des efforts qu’il estime.
Mais que-pour toi, perdant et ton temps et tes pas,
Sur tes petits pieds tu bondisses ;
Que tu tournes sans cesse, au gré de tes caprices ;
De tout cela, dis-moi, que sort-il ? Du fracas. »
Sans peine on concevra le travers que je fronde.
Sans but pourquoi courir ou noircir du papier ?...
On trouve, hélas ! dans ce bas monde,
Mille écureuils pour un coursier !
Fable traduite de l'espagnol d'Yriate