Les Furies Léon Halévy (1802 - 1883)

« Il me faudrait d'autres Furies ;
Les miennes ont besoin de repos, je le vois :
Le servie les a vieillies,
Les mettre à la réforme est un devoir pour moi.
Pars donc, et cherche-moi trois femmes sur la terre
Qui puissent dignement remplir ce ministère. »
Ainsi parlait Pluton ; Mercure entend et part.
Or, peu de temps après, Junon, prenant a part
La belle Iris, sa messagère,
Lui dit : « Il me faudrait trois filles de vertu,
De la vertu la plus sévère,
Et chez qui le devoir n’ait jamais combattu.
Je les veux sans défaut, chastes, sages, prudentes,
Enfin trois filles.... étonnantes!
Chez les mortels tu dois les rencontrer.
Pars donc. Vénus me brave, et je veux lui montrer
Qu’elle n’a point soumis, quoi qu'elle en puisse dire,
Tout notre sexe a son empire.
Il te faudra du temps, je te donne six mois....
Non point pour les trouver, mais pour fixer ton choix. »
Iris part.... En quel coin du monde
Ne se dirigea pas sa course vagabonde?
Vains efforts! seule, hélas! il fallut revenir!
« Quoi! seule! dit Junon; corruption profonde!
O pudeur! 6 vertu!.... Qu’allons-nous devenir ?
— J'aurais pu, dit Iris, vous amener, Déesse,
Trois filles dont le coeur fut toujours sans faiblesse,
Trois filles sans défaut, pleines d’austérité,
» D’une exemplaire chasteté,
Dont la bouche jamais ne connut le sourire,
Ni le cœur un tendre délire...
Mais j'arrivais trop tard. - Et comment, dit Junon ?
Parlez, je ne puis vous comprendre.
- Mercure pour PLuton était venu les prendre.
- Que me dites-vous ? Pour Pluton !
Trois filles de sagesse et de vertu pétries !
Qu'en veut-il faire ? - Des Furies.



Fable imitée de Lessing

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