Le soleil rayonnait sur les bois et les plaines
Depuis longtemps,
Et les promesses du printemps
Devenaient vaines ;
Les cieux étaient sereins, rien n’en tachait l’azur
La terre était dans la souffrance ;
La fleur inclinait son front pur,
Et l’espérance
Ne germait plus dans le sillon.
Un nuage parut comme un noir tourbillon :
— Il est temps que j’arrive,
Cria-t-il au soleil,
Si je veux que la terre vive
Et secoue un peu son sommeil ;
Tu crois la réchauffer et ton rayon la brûle ;
Recule !
Laisse-moi réparer les maux
Que tu causes en mon absence.
Le nuage, à ces mots,
Pour montrer sa puissance,
Ouvre son aile sombre et voile le ciel d’or.
Il fit longtemps pleuvoir, et la terre, inondée
Par cette interminable ondée,
Souffrit encor.
Alors l’inquiétude
Entra dans l’âme des humains,
Et puis la multitude,
Vers le ciel élevant les mains,
Supplia le Dieu sage
De mettre enfin d’accord et soleil et nuage.
Le Seigneur entendit ses vœux.
— Écoutez, dit-il, je le veux,
Brillant soleil, nuage sombre ;
La terre a besoin de vous deux ;
Il lui faut l’eau du ciel mais il lui faut ses feux :
Allez souvent, mais non pendant des jours sans nombre,
Pour mieux la féconder,
De pluie et de rayons tout à tour l’inonder.
Notre cœur a besoin, comme la terre avide,
D’orage et de soleil souvent et tour à tour ;
Un bonheur trop constant le rend parfois aride,
Un long malheur, parfois, l’écrase sans retour.