Le petit lapin

Léonce Pontonnier (17?? - 18??)


Dans son terrier vivait en bonne intelligence
Une famille de lapins.
La mère possédait une grande influence ;
D’ailleurs toujours justes et sains,
Ses avis étaient tous dictés par la prudence.
Elle avait dit cent fois : « Lorsque de ce logis
Je sors pour vous chercher la douce nourriture.
N’allez pas, mes enfants, comme des étourdis,
Vous, si faibles et si petits,
Trottiner dans le bois broutant à l’aventure,
Car vous pourriez être surpris
Par quelqu’un de nos ennemis.
Attendez, attendez, trop tôt on abandonne
L’asile d’une mère et prévoyante et bonne,
Les jours les plus heureux
S’écoulent auprès d’elle,
On ne se les rappelle
Même alors qu’on est vieux,
Que les larmes aux yeux. »
Un matin, commençant sa course accoutumée.
Elle laisse au terrier sa famille affamée.
Dès qu’elle fut dehors, espiègle et sans souci,
Le moins âgé de tous prit la parole ainsi :
« Notre mère, sans doute,
Faisant mainte gambade et mainte cabriole.
Déjà notre jeune imprudent
Erre ainsi depuis plus d’une heure
Sa mère se lamente et pleure
Sur les dangers de son enfant
Il veut regagner sa demeure
Mais c’est en vain qu’il va cherchant.
Pauvre petit, sans flair et sans mémoire,
Il a perdu le chemin du terrier ;
Et cependant voilà qu’un lévrier ,
Qui poursuivait moins facile victoire,
L’apercevant au détour d’un sentier,
L’a tout d’abord choisi pour sa pâture ;
Mourant de peur, la frêle créature,
Au lieu de fuir ne sait que prier ;
Elle sanglote, elle implore et conjure,
Mais les discours n’étaient pas de saison ;
Elle reçoit la mortelle blessure
En murmurant : « Ma mère avait raison ! »





Commentaires