Borée, après avoir troublé
Par d'affreux ouragans le repos de la Terre,
Dormait, de fatigue accablé,
Sur une plage solitaire.
La Terre, apercevant son farouche ennemi,
Les yeux clos, et bien endormi,
Bon ! dit-elle, il est temps d'en faire une victime":
Osons nous venger, à la fin,
Et dans un gouffre souterrain
Plongeons ce tyran qui m'opprime.
Elle dit : sous Borée un abîme est ouvert,
Et dans sa profondeur le voilà qui se perd.
Déjà, sous de vastes décombres,
La Terre, sans retour, le croyait englouti,
Quand du fond des demeures sombres,
Un mugissement sourd à trois fois retenti.
Borée, outré de son injure,
S'agitait de fureur, dans sa prison obscure,
Et pour briser d'indignes fers,
Soulevait les monts et les mers.
Aux signes de sa rage au plus haut point portée,
La Terre, tout-à-coup, frissonne épouvantée :
Bientôt elle éclate, se fend
Au bruit d'une horrible tempête,
Et par la' brèche qu'il a faite,
Borée au sein des airs s'élance triomphant.
Conseil donné par la vengeance
Est au prix du remords, trop souvent acheté :
S'en prendre au faible est lâcheté ;
S'en prendre au fort est imprudence.