Un jeune villageois, chasseur déterminé,
Regagnant le logis, trouva sur son passage
Un habitant de son village.
Vois-tu d'ici ce mont de sapins couronné?
Lui dit-il : j'y chassais au lever de l'aurore ;
Et, quoiqu'il soit midi, par l'ardeur entraîné,
Si je n'étais à jeun, j'y chasserais encore^
J'ai traversé des bois, des ruisseaux, des ravins ;
J'ai franchi d'affreux précipices.;
Mais les Dieux m'ont été propices :
Je reviens glorieux, chargé de six lapins.
Cette chasse est assez honnête ;
Conviens-en : -aussi bien quel chasseur oserait
Se comparer à moi ? Là—dessus son furet,
Animal à l'œil vif, au corps long et fluet,
Hors de la gibecière, élève un peu la tête.
Qui de nous deux a fait les plus brillants exploits ?
Ma gloire, pour le moins, est égale à la tienne.
Tes six lapins, qu'il t'en souvienne,
C'est à moi seul que tu les dois,
Le Chasseur ne dit rien ; mais sous un air tranquille,
Cachant tout le dépit qu'il avait dans le cœur,
Au nez de l'indiscret décoche avec humehr
Une chiquenaude incivile.
Notre Furet confus rentra dans sa prison.
Que l'homme est vain ! dit-il, la vérité l'offense ;
À le servir que gagne-t-on ?
Ce roi des animaux, si fier de sa raison,
A bien peu de reconnaissance.