Au pied d'un chêne une Rose vermeille
Exhalait doucement ses suaves odeurs
Du pays c'était la merveille ;
Gardant depuis un mois constamment ses couleurs,
Elle semblait toujours nouvelle.
Le zéphyr amoureux était fixé près d'elle
Et s'enivrait de ses faveurs.
A dix pas d'elle, une autre Rose,
Depuis deux jours à peine éclose,
Lui dit « Ma sœur, je vais mourir.
Mais vous, tous les matins, on vous voit rajeunir a
D'un sort si différent apprenez-moi la cause ».
— « Je vais, lui dit sa sœur, répondre à ton désir.
Au grand jour, par malheur, tu fus trop exposée :
Par les feux du soleil je te vois embrasée ;
Ses rayons dangereux fanent toutes les fleurs.
De cet arbre touffu l'ombrage salutairę
Me garantit de ses ardeurs ;
Sans lui j'aurais cessé de jouir et de plaire :
C'est son ombrage protecteur
Qui m'a jusqu'à présent conservé ma fraîcheur ».
Amans ! heureux amans ! évitez la lumière ;
Ce n'est qu'à l'ombre du mystère
Qu'on peut conserver le bonheur.